- Dahir n° 1-04-257 du 25 kaada 1425 (7 janvier 2005) portant promulgation de la loi n° 77-03 relative à la communication audiovisuelle.
- * Loi n° 77-03 relative à la communication audiovisuelle
Dahir n° 1-04-257 du 25 kaada 1425 (7 janvier 2005) portant promulgation de la loi n° 77-03 relative à la communication audiovisuelle.
LOUANGE A DIEU SEUL !
(Grand Sceau de Sa Majesté Mohammed VI
Que l'on sache par les présentes - puisse Dieu en élever et en fortifier la teneur !
Que Notre Majesté Chérifienne,
Vu la Constitution, notamment ses articles 26 et 58,
A décidé ce qui suit :
Est promulguée et sera publiée au Bulletin officiel, à la suite du présent dahir, la loi n° 77-03 relative à la communication audiovisuelle, telle qu'adoptée par la Chambre des représentants et la Chambre des conseillers.
Fait à Agadir, le 25 kaada 1425 (7 janvier 2005).
Pour contreseing,
Le Premier ministre,
Driss Jettou.
* * Loi n° 77-03 relative à la communication audiovisuelle
Préambule
La loi n° 03-77 relative à la communication audiovisuelle constitue un jalon important dans le processus visant à mettre en place le cadre juridique de la libéralisation de ce secteur et qui a débuté avec la promulgation du dahir n° 1-02-212 du 22 joumada II 1423 (31 août 2002) relatif à la création de la Haute autorité de la communication audiovisuelle et le décret loi n° 2-02-663 du 2 rejeb 1423 (10 septembre 2002) portant suppression du monopole de l'Etat en matière de radiodiffusion et de télévision, ouvrant ainsi la voie à la libre entreprise de communication audiovisuelle.
Cette loi s'inscrit dans le cadre des profondes mutations que vit le Royaume du Maroc dans la voie du renforcement de l'option démocratique dans laquelle il s'est engagé et de la consécration des fondements de l'Etat de droit et de l'espace des libertés publiques ainsi que de l'édification du projet de société moderniste et démocratique, initié et conduit par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu l'assiste.
La réforme du secteur de la communication audiovisuelle est, en effet, une composante essentielle de ce mouvement général de réformes engagé, étant donné l'importance de son rôle dans la consécration des valeurs de liberté, de pluralisme, de modernité, d'ouverture, de respect des droits de l'Homme et de sa dignité, de qualification de notre pays, aussi bien sur le plan politique que sur le plan économique, social et culturel. C'est cette conviction que Sa Majesté le Roi a solennellement exprimé dans le dahir portant création de la Haute autorité de la communication audiovisuelle en considérant que " le droit à l'information, élément essentiel de la libre communication des pensées et des opinions, doit être assuré, notamment par une presse indépendante, des moyens audiovisuels pouvant se constituer et s'exprimer librement, un service public de radio et de télévision à même d'assurer le pluralisme des divers courants d'opinion, dans le respect des valeurs civilisationnelles fondamentales et des lois du Royaume".
Cette loi se fonde, dans sa philosophie générale et ses objectifs, sur, d'une part, les constantes et les référents constitutionnels du Royaume que sont l'Islam, l'unité nationale et territoriale et la monarchie constitutionnelle et, d'autre part, les principes universels relatifs aux droits de l'Homme, tels que reconnus au niveau international. Elle traduit également la ferme volonté royale de développer l'option démocratique du pays à travers la consécration du pluralisme, la consolidation des fondements de l'Etat de droit et des institutions et la garantie de l'exercice de la liberté d'expression et d'opinion, dans un esprit de responsabilité.
Le message royal adressé à la famille de l'information et de la communication à l'occasion de la journée nationale de l'information, le 15 novembre 2002, est venu confirmer ces principes et ces valeurs, en réaffirmant : " Liberté, car il ne pourrait y avoir d'essor et de développement pour l'avènement d'une presse de qualité sans l'exercice de la liberté d'expression. Responsabilité, parce qu'il ne saurait y avoir de reconnaissance de la nécessaire crédibilité des médias, du véritable rôle qui leur échoit dans notre vie publique sans que cette liberté soit exercée dans la responsabilité ".
Ainsi, ce texte fixe le cadre juridique qui détermine les principes généraux et les mécanismes essentiels nécessaires à la restructuration et à la réglementation du secteur audiovisuel pour qu'il soit plus en phase avec les développements multiples et les transformations rapides que connaît le paysage audiovisuel et puisse se développer et jouer également son rôle en tant que levier du développement. Le message royal a clairement affirmé cette finalité, en déclarant notamment que " notre paysage médiatique national ne saurait relever les défis du nouveau millénaire, ceux qu'impose la globalisation de l'offre des médias et la généralisation graduelle de l'accès aux ressources de la société de l'information et de la communication, sans une refonte de ses modes de fonctionnement, et sans qu'il soit doté des dispositifs juridiques, des outils et des ressources nécessaires pour ce faire ", Sa Majesté ajoutant : " Nous avons grand espoir qu'à travers la conjugaison des talents et des efforts de tous, et à travers une réelle prise de conscience quant au rôle et à la place qui reviennent aux médias dans l'animation de la vie démocratique nationale, notre paysage médiatique puisse rapidement accéder au niveau de développement auquel notre pays a droit ".
S'inspirant des Hautes Orientations Royales, cette loi, qui constitue le prolongement de toutes les lois en vigueur dans le domaine de l'information et qui est le fruit d'une large concertation et d'un débat entre l'ensemble des acteurs du secteur audiovisuel, vise les objectifs suivants :
- La consécration de la liberté de communication audiovisuelle et la garantie des libertés d'expression, d'opinion et de communication, individuelles et collectives, ainsi que le respect des règles de l'éthique et de la déontologie, le respect des droits de l'homme, notamment le respect de la dignité de la personne humaine, de la vie privée des citoyens et de l'expression pluraliste des courants de pensée ainsi que des principes démocratiques ;
- La contribution au développement socio-économique, culturel et en matière d'information, tant au niveau national que régional et local, dans un cadre concurrentiel garantissant la diversité de l'offre de services, le pluralisme des courants de pensée et la contribution
effective de l'ensemble des intervenants dans le développement du secteur de la communication audiovisuelle ;
- Le soutien et le développement du secteur public de la communication audiovisuelle et sa dotation des moyens nécessaires pour faire face aux défis de la qualité et de la compétition et s'acquitter de ses missions de service public ;
- L'incitation et le soutien à l'investissement privé dans ce secteur et au développement d'une industrie productive de la communication audiovisuelle ;
- Le soutien et le développement de la production nationale audiovisuelle et le recours en priorité aux ressources et aux compétences nationales ;
- La préservation du patrimoine culturel de la Nation dans sa richesse et sa diversité, à travers la promotion de la créativité artistique, scientifique et technologique et la garantie de son rayonnement ;
- Le respect de la législation et de la réglementation relatives à la protection des droits d'auteur et droits voisins.
Ainsi, et afin d'atteindre les objectifs tracés, ce texte instaure un contexte de diversification en offrant des perspectives d'installation et d'exploitation de réseaux de communication audiovisuelle à de nouveaux opérateurs privés dans un cadre organisé et transparent, en harmonie avec l'esprit d'ouverture que connaît la société marocaine.
Il vise également à la mise en place d'un secteur public audiovisuel fort, en mesure de prendre en charge, dans l'intérêt général, les missions de service public qui lui incombent et qui consistent à répondre aux attentes des citoyens et à leurs besoins dans les domaines de l'information, de la culture, de l'éducation et du divertissement, à travers le soutien à la création d'oeuvres originales de qualité, la garantie de l'expression régionale, l'encouragement d'une information de proximité, la promotion du patrimoine civilisationnel et de la création artistique nationaux et la contribution à leur rayonnement, national et international, tout en prenant en considération la priorité accordée à la production nationale et aux compétences et ressources nationales travaillant dans le secteur, ce qui nécessite la mise à niveau et la restructuration des composantes actuelles de ce secteur et la qualification continue des ressources humaines afin de promouvoir leur action à un niveau meilleur.
Enfin, ce texte donne à la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle, dans le cadre des attributions et des prérogatives que lui confère le dahir qui l'a instituée, et aux différents pouvoirs publics compétents, les outils nécessaires pour réguler le secteur et accompagner son développement, en prévoyant les différents mécanismes, procédures et mesures à mettre en oeuvre,
Titre premier
Définitions et principes généraux
Chapitre premier : Définitions
Article premier :
Pour l'application de la présente loi et des textes pris pour son application, on entend par :
1. Communication audiovisuelle : toute mise à la disposition du public ou de catégorie de public, par un procédé de télécommunications, de signes, de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature qui n'ont pas le caractère d'une correspondance privée.
2. Contrepartie financière : compensation financière versée par l'attributaire d'une licence ou d'une autorisation à l'issue d'un appel à la concurrence ou d'une procédure de gré à gré.
3. Distributeur de services : toute personne morale qui établit avec des éditeurs de services des relations contractuelles en vue de constituer une offre de services de communication audiovisuelle mise à la disposition du public par voie hertzienne terrestre, par câble ou par satellite ou par tout autre mode technique. Est également regardée comme distributeur de services toute personne qui constitue une telle offre en établissant des relations contractuelles avec d'autres distributeurs.
4. Editeur de services : toute personne morale qui assume la responsabilité éditoriale d'un ou de plusieurs services audiovisuels composés de programmes qu'elle a produits, coproduits, fait produire ou acheter, en vue de les diffuser ou de les faire diffuser.
5. Exigences essentielles : les exigences nécessaires pour garantir, dans l'intérêt général, la sécurité des usagers et du personnel des opérateurs de communication audiovisuelle, la sécurité du fonctionnement du réseau, le maintien de son intégrité, l'interopérabilité des services et celle des équipements terminaux, la protection, l'intégrité et l'authentification des données, la protection de l'environnement et la prise en compte des contraintes d'urbanisme et d'aménagement du territoire ainsi que l'utilisation rationnelle du spectre des fréquences radioélectriques et la prévention de toute interférence préjudiciable entre les systèmes de télécommunications par moyens radioélectriques et d'autres systèmes terrestres ou spatiaux.
6. Fréquences radioélectriques audiovisuelles : fréquences radioélectriques affectées par l'Agence nationale de la réglementation des télécommunications, ci-après dénommée ANRT, au secteur de la communication audiovisuelle.
7. Oeuvre audiovisuelle : constituent des oeuvres audiovisuelles les émissions ne relevant pas d'un des genres suivants : oeuvres cinématographiques, journaux et émissions d'information, variétés, jeux, émissions autres que de fiction majoritairement réalisées en plateau, retransmissions sportives, messages publicitaires, télé-achat, auto-promotion, services de télétexte.
8. Ondes radioélectriques ou fréquences radioélectriques : les ondes électromagnétiques se propageant dans l'espace sans guide artificiel.
9. Opérateur de communication audiovisuelle : toute personne morale, titulaire d'une licence ou d'une autorisation dans les conditions fixées par la présente loi, qui met à la disposition du public un ou plusieurs services de communication audiovisuelle, y compris les services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne, par câble, par satellite ou par tout autre mode technique.
10. Production audiovisuelle : tout programme de radio et/ou de télévision que l'opérateur de communication audiovisuelle conçoit et/ou produit en interne par ses propres moyens ou fait concevoir et produire par des structures de production du marché.
11. Production audiovisuelle nationale : toute production audiovisuelle émise en arabe, en amazigh, en dialectes marocains ou, le cas échéant, en tout autre langue dont le contenu est à fort enracinement marocain, et dont la personne morale qui prend l'initiative et la responsabilité de la réalisation est installée au Maroc et a recours à des compétences majoritairement nationales.
12. Production propre : les programmes conçus et/ou produits directement par un opérateur d'un service de communication audiovisuelle. Ces programmes ne peuvent être constitués ni par la diffusion répétée ni par la retransmission simultanée ou différée de programmes d'une autre station.
13. Réseau de services de communication audiovisuelle : toute infrastructure permettant de fournir un service de communication audiovisuelle.
14. Secteur public de la communication audiovisuelle : ensemble regroupant différents services audiovisuels à caractère public et sociétés de communication audiovisuelle dont le capital est majoritairement ou entièrement souscrit par l'Etat et qui assure l'exécution de sa politique en la matière et ce dans le respect des principes d'égalité, de transparence, de continuité, d'universalité et d'adaptabilité.
15. Service de communication audiovisuelle : tout service ou ensemble de services diffusant un même programme pour une proportion majoritaire du temps d'antenne de chaque service.
16. Spectre des fréquences radioélectriques : ensemble des ondes radioélectriques.
17. Système d'accès conditionnel : tout dispositif technique permettant, quel que soit le mode de transmission utilisé, de restreindre l'accès à tout ou partie d'un ou plusieurs services de communication audiovisuelle au seul public autorisé à les recevoir.
18. Télécommunication : toute transmission, émission ou réception de signes, de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de renseignements de toute nature par fil, optique, radio-électricité ou autres systèmes électromagnétiques tels que déterminés par la loi n° 24-96 relative à la poste et aux télécommunications.